Les années se suivent et se ressemblent presque. Depuis 2021, le CAD alerte sur la détérioration des droits humains dans le pays. Chaque année les conclusions sont terribles mais cette fois-ci, le pays a passé un cap supplémentaire. Notre organisation a documenté en 2024 8.216 violations des droits humains, alors qu’elles étaient à 2.092 l’an passé. Télécharger le rapport
Les auteurs des violations des droits humains qui continuent à imposer leur narratif. Cette impunité remet en cause les engagements pris par les gouvernants.
L’analyse des faits confirme un mépris flagrant de la législation nationale et internationale sur la protection des droits humains. Ce qui affecte de manière considérable les victimes directes et indirectes, et détériore davantage la confiance dans les institutions publiques.
De plus, le Gouvernement ne s’est pas attaqué résolument à la corruption, et n’a pas été en
mesure de bien gérer la crise économique et sociale qui s’est traduite à la fois par l’absence de
création d’emplois, le non-paiement des salaires des travailleurs, des pensions de retraite
et des bourses des étudiants, et par l’abandon jusqu’au délabrement des services publics.
Les atteintes à l’espace civique ont connu une augmentation de 190% comparativement à l’année précédente. Les autorités congolaises ont entravé et réprimé les libertés d’expression, de réunion, de rassemblement pacifique ainsi que d’autres libertés constitutionnellement garanties. Ces violations se sont manifestées à la fois, par un usage disproportionné de la force publique, et par la multiplication des
intimidations et arrestations. Des gens ont été blessés et emprisonnés. Le maintien de l’ordre public dans le respect des lois et des droits humains a été un défi pour les forces de sécurité. Des défenseurs des droits humains et journalistes ont été inquiétés pour leur travail. Les conditions d’exercice du journalisme restent problématiques dans le pays. De façon insidieuse, les autorités politiques exercent des pressions sur les médias et sur les journalistes.
Les multiples entailles dans l’exercice des libertés fondamentales enregistrées au cours de l’année 2024 ne font que renforcer les inquiétudes quant au recul des libertés civiques au Congo Brazzaville depuis plusieurs années maintenant
Les arrestations et détention arbitraires sont en augmentation respectivement de 711% et 670% comparativement à l’année passée. Les forces de l’ordre ont continué à entretenir un climat de terreur dans le pays. L’opération « Coup de poing » a été un facteur d’aggravation.
La disparition forcée a augmenté de 200% comparativement à l’année passée. La force publique
a détenu au secret et a fait disparaître de force des gens. Les uns n’ont plus donné signe de vie
après leur interpellation.
Les prisons restent une honte pour le Gouvernement qui n’a pris aucune mesure sérieuse pour améliorer les conditions de détention dans le pays. Déchets, urines, excréments, moisissures, parasites, promiscuité forcée, vétusté des bâtiments, famine, malnutrition, maladies, déficit de literie etc., la vie en prison est un feuilleton d’humiliation quotidienne. Plusieurs cas de décès en prison ont été signalés. En dépit des obstacles pour accéder aux informations auprès des responsables des prisons, le CAD a recueilli au moins
10 témoignages directs de décès pour mauvais traitements, notamment dans les prisons de Ouesso, Pointe-Noire et Brazzaville. Ce nombre ne représente qu’une fraction de la réalité.
Les atteintes au droit à la vie sont en augmentation de 194% par rapport à l’année passée et impliquent les forces de l’ordre principalement. Ces atteintes consistent en des exécutions extrajudiciaires, actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants. Les autorités ont également toléré les actes de vindictes populaires des jeunes supposés violents dans les quartiers, notamment à Brazzaville et Pointe-Noire. Cette déviation de responsabilité dont le but insidieux est de faire participer les populations à l’objectif funeste d’« éradication du phénomène dit bébés noirs », rend l’État congolais complice des tueries pour avoir manqué gravement à son devoir de protéger et de rendre justice.
Nous avons noté une augmentation de 1253% comparativement à 2023. Les forces de l’ordre continuent à être largement mises en cause pour l’utilisation de la torture et des mauvais traitements. Certains cas documentés ont conduit à des pertes en vies humaines, y compris en détention. L’État n’a pris aucune
mesure législative, administrative ou autres pour empêcher les actes de torture et autres traitements dégradants. L’impunité semble devenir un « nouveau droit », puisqu’il y a un écart abyssal entre le nombre des dénonciations et plaintes en justice pour violations graves des droits humains et l’absence presque totale des poursuites et procès.
En 2024, la pauvreté et les inégalités ont encore progressé dans le pays faisant du mal à des milliers
d’individus. Le poids de la dette publique, la crise économique et sociale, la corruption et autres dé faillances du Gouverne ment ont renforcé le délaissement des services publics et accru la marginalisation des plus vulnérables, notamment. Nous n’avons identifié aucune politique viable et durable élaborée par le Gouvernement pour protéger les plus défavorisés. Selon la Banque Mondiale, les dépenses sociales en faveur des plus pauvres baissent depuis 2023 et leur taux d’exécution reste nettement inférieur à celui du budget dans son ensemble. Les retraités et autres travailleurs des secteurs à budget de transferts ont vu leurs droits à la dignité, à un niveau de vie satisfaisant, à la santé, à un environnement propre s’effondrer progressivement.
Les répercussions de la mal gouvernance combinée à la crise financière ont accru les difficultés du secteur de la santé. Celui-ci a fonctionné au rythme des grèves dont l’impact n’a pas été évalué. Les préoccupations concernant les conditions de travail des agents de santé, de la mauvaise qualité des infrastructures et de la prise en charge des malades n’ont pas eu de réponses satisfaisantes. Les défaillances du système de santé ont été à l’origine des homicides involontaires. L’Etat continue de maltraiter les bénévoles animant les centres de santé en milieu rural. Certains perçoivent entre 3000 et 5000 FCFA le mois soit environ 7 euros par mois. Une rémunération de honte, assimilable à une forme d’esclavagisme.
Elles représentent environ un pourcent (1%) de la population congolaise et font face à un mépris sans commune mesure. Le principe d’égalité devant la loi est un véritable leurre dans la mesure où les populations autochtones ne bénéficient pas des services publics au même titre que les autres congolais.